Matthieu 14 : 13-21 – 2 août 2020

Le récit de la multiplication des pains est l’un des rares événements de la vie de Jésus qui se retrouvent dans les quatre évangiles du Nouveau Testament.  S’il existe quelques variations d’un récit à l’autre, l’histoire est essentiellement toujours la même.  Jésus enseigne à une large foule dans un endroit isolé.  Il est tard.  Les disciples pressent leur maître de renvoyer les gens parce qu’ils n’ont pas assez de nourriture pour subvenir aux besoins de la foule.  Après quelques recherches, ils trouvent 5 pains et 2 poissons.  La distribution débute.  Toutes et tous mangent à leur faim.  Et il y a même une grande quantité de restants à la fin du repas. 

Le texte de ce soir tiré de l’Évangile selon Matthieu ne nous explique pas qu’est-ce qui s’est vraiment passé ce jour-là?  Est-ce que plus de pain et des poissons se sont matérialisés dans les corbeilles des disciples à la suite d’une intervention divine?  Est-ce que les gens ont décidé d’ouvrir leur besace et ont commencé à partager leur lunch avec les gens autour d’eux?  Est-ce que Jésus a réussi un tour de magie en coupant le pain et les poissons en très petits morceaux?  Je crois que nous ne le serons jamais.

Ce qui a retenu mon attention cette semaine en travaillant ce texte est la directive que Jésus donne à ses disciples.  Constatant le défi relié à la grosseur de la foule, il ne dit pas : « Tassez-vous les jeunes!  Mononcle Jésus va régler votre problème. »  Il dit plutôt ses disciples : « Il n’est pas nécessaire qu’ils s’en aillent; donnez-leur à manger! »  Nous associons souvent Jésus au miracle de la multiplication des pains.  Mais lorsqu’on y porte attention, le texte nous dit que Jésus ne fait que prier.  Ce sont les disciples qui doivent agir.  Ce sont eux qui doivent prendre une initiative, montrer un peu de leadership, et comprendre qu’ils possèdent les ressources pour régler ce problème.

Dans la vie de tous les jours, c’est tellement facile de se décourager lorsque l’on fait face à un problème.  Trop souvent, on se plaint que nous n’avons pas assez d’argent ou de bénévoles.  On blâme l’absence de volonté publique.  On se répète qu’en temps de récession et de coupures un peu partout, plus rien n’est possible.    Nos rêves ne sont qu’une perte de temps.  Mais dans le fond, ce que nos mots cachent souvent est un sentiment d’impuissance.  On ne veut pas être embarrassé.  On veut éviter la défaite.  On a peur que tous nos efforts conduisent à encore plus déception et de douleur. 

Peut-être en raison du retour du hockey (pour le meilleur ou le pire), je me suis rappelé l’une des célèbres déclarations de Wayne Gretzky qui disait : si on ne tire jamais au but, on est certain à 100% de ne pas marquer.  Là où les disciples voyaient un problème, Jésus y a vu une possibilité.  Il les a invités à avoir l’audace et la témérité de croire que notre monde a assez de ressources pour subvenir aux besoins tous ses habitants, que nous ne sommes pas condamnés à abandonner lorsque la situation est difficile, et que nous pouvons trouver une forme d’abondance dans la présence de Dieu dans nos vies.

Mais les résultats de cette prise de conscience ne tombent pas du ciel comme la manne dans le désert au temps de Moïse et des israélites.  Absolument rien ne peut se produire sans notre implication. Jésus ne nous appelle pas à nous limiter à de beaux discours ou gérer la décroissance de nos ressources.  Notre mission est d’agir, parfois à des moments inattendus et avec des moyens pas encore testés.  Dieu ne peut être actif dans notre monde qu’à travers nos mains, nos voix, notre créativité, notre détermination… Nous sommes toutes et tous appelées à accepter la responsabilité d’être des agents de transformation dans notre monde, d’inviter les gens à travailler ensemble pour des buts communs et de rêver à un monde renouveler.  Et surtout, nous sommes appelés à ne jamais nous décourager si nos projets ne se matérialisent pas de la manière que l’on voudrait parce que Dieu a été avec nous tout au long du parcours.

C’est toujours difficile d’expliquer un miracle comme la multiplication de pains dans un monde logique et scientifique.  Peut-être le vrai miracle est que les disciples ont découvert qu’ils étaient capables de relever un défi qui leur paraissait trop grand, et compliqué.  Peut-être ce récit vise à nous enseigner à voir le potentiel dans chaque situation, à nous inviter à retrousser nos manches et à croire l’abondance se trouve constamment autour de nous. Amen.

* Hans-Peter Gauster, Unsplash.com