Sermon – 1 Jean 3: 24-36 (25 avril 2021)
Quels sont les principes de base auxquels une personne doit adhérer pour être considéré un chrétien ou une chrétienne? Où doit-on tracer la ligne? Peut-être avez-vous déjà une réponse en votre tête… et je suis prêt à parier qu’elle est différente de la mienne ou de celle des autres personnes. À une autre époque, c’était plus facile. Il suffisait d’aller à l’église chaque dimanche matin. Cependant, la réalité de 2021 est un peu plus compliquée. Aujourd’hui, est-ce une question de fréquentation? Est-ce une question monétaire? Est-ce une question de croyances? Il y a quelques semaines, Marie nous demandait s’il fallait vraiment croire en la résurrection physique du Christ pour être chrétien. C’est une très bonne question. Allons un peu plus loin dans notre réflexion. L’Église Unie du Canada est reconnue pour sa diversité et son inclusivité. Greta Vosper est une pasteure dans une paroisse dans la grande région de Toronto. Elle a écrit plusieurs livres et articles affirmant qu’elle est athée. Elle ne croit pas en l’existence un dieu surnaturel. Le titre de l’un de ses livres les plus populaires est : “With or Without God : Why The Way We Live is More Important Than What We Believe.” (Avec ou sans Dieu: pourquoi la façon que l’on vit est plus importante que ce que l’on croit.) Rendu à cette étape, peut-on affirmer que l’on soit encore chrétien?
Ce soir, nous avons lu un extrait de la première lettre de Jean. Ce livre biblique très court n’est pas utilisé souvent dans nos Églises. Cela explique surement pourquoi nous le connaissons peu. Nous pouvons quand même affirmer avec certitude que l’auteur n’est pas Jean, le disciple de Jésus. Ce texte a été écrit probablement vers l’année 100 de notre ère. Même si les experts trouvent des ressemblances entre ce livre, le quatrième Évangile et l’Apocalypse, il n’y a pas de consensus clair, net et précis que c’est le même auteur.
Contrairement aux épitres de Paul, la première lettre de Jean n’a pas de destinataire précis. En fait, ce texte ressemble davantage à un sermon tentant de résoudre une problématique. Encore une fois, le contexte est important pour bien comprendre l’intention de l’auteur. Jésus est mort depuis environ 75 ans. Les premiers disciples sont également décédés. À cette étape, un mouvement manifestement juif au début s’est répandu un peu partout dans le monde gréco-romain et il est confronté aux influences des autres cultures, des autres religions et des autres philosophies. Étant donné l’absence d’un pouvoir fort et centralisé, personne ne peut définir une forme d’orthodoxie, d’où la question difficile qui sous-tend le texte de ce soir. Quels sont les éléments non négociables pour être considéré chrétien? Que fait-on avec les nouveaux qui arrivent avec de nouvelles idées et qui veulent tout changer? Faut-il s’adapter au monde ou conserver la pureté des valeurs et pratiques?
C’est dans ce contexte que l’auteur constate des tensions et des divisions dans sa communauté. Certains membres semblent avoir quitté le groupe pour des questions d’interprétations théologiques. Il décide de lancer un appel à l’unité malgré les distinctions et les défis. Il veut expliquer le sens du message de Jésus dans un contexte plus large. Il tente de définir les bases de sa communauté en pleine crise d’identité.
Plusieurs s’attendraient à un traité établissant les critères qui distinguent la vraie foi de l’erreur, à une longue liste de standards précis afin de différencier les croyants des mécréants, ou à une série de dogmes à mémoriser. L’auteur nous surprend en accordant une très grande place à l’éthique. Il affirme: « Si un homme, qui est riche, voit son frère dans le besoin mais lui ferme son cœur, comment peut-il prétendre qu’il a de l’amour de Dieu dans son cœur? » En effet, comment une personne qui choisit de suivre les enseignements de Jésus peut-elle refuser d’aider son prochain? La justice, la vertu et le salut doivent se manifester d’abord dans les actions de notre vie de tous les jours.
Plusieurs études démontrent clairement que les personnes se désintéressent de la religion non pas à cause de ses valeurs, mais en raison de l’hypocrisie des gens qui affirment une chose et font son contraire. On proclame l’amour inconditionnel pour notre prochain, mais on rejette des personnes pour de critères arbitraires de sexualité ou de genre. On prône le partage des ressources, mais on gère nos actifs comme une compagnie privée. On fait la promotion de l’humilité, mais on est les premiers à se pointer devant des caméras pour affirmer avoir la bonne réponse sur les questions éthiques. On prêche le pardon, mais on n’est pas capable de s’excuser. Nous n’avons jamais été appelés à vivre notre foi entre les quatre murs d’un édifice en pierres ou le sous-sol de nos maisons. Nos vies influencées par le Christ ressuscité se doivent d’être incarnées dans notre quotidien. Nous ne sommes pas obligés à le proclamer à toutes les secondes. « Je t’ai ouvert la porte parce que je suis chrétien. » Nous devons juste agir, exprimer ce qu’il y a dans notre cœur et contribuer à créer le monde dans lequel nous voulons vivre.
Il existe des divisions dans les Églises et les communautés de foi depuis le début de la chrétienté. Le texte de ce soir nous rappelle simplement que notre identité ne se trouve pas nécessairement dans l’orthodoxie (la foi juste) mais l’orthopraxie (la pratique juste). Cela ne veut pas dire que tout est permis et que la foi est un buffet à volonté. Nous sommes appelés à réfléchir d’abord à nos actions, et comment celles-ci révèlent notre identité de disciples de Jésus le Christ à la face du monde. Amen.