Sermon – Jean 15: 9-17 (9 mai 2021)

* Jean 15: 9-17

La semaine dernière, j’ai revu le film « Le Parrain » peut-être pour la 30efois.  Encore une fois, j’ai replongé dans cet univers truffé d’expressions cultes que je connais par cœur.  Le personnage de Don Vito Corleone, joué par Marlon Brando, est vraiment fascinant.  Il est l’incarnation de ce que nos voisins du sud appellent l’American Dream : un orphelin arrivant aux États-Unis à l’enfance qui devient riche et puissant.  Cet homme se hisse à la tête du crime organisé en s’entourant d’hommes obéissant à tous ses ordres, en offrant des faveurs à des quidams avant de leur imposer sa volonté, et en développant des amitiés avec des individus qui vont le protéger des conséquences de ses crimes.  Comme le film le répète à plusieurs reprises : « It is not personal; it’s only business. »

Comprenez-moi bien.  Mon appréciation pour ce chef-d’œuvre de Francis Ford Coppola n’implique pas que je fais l’apologie du crime organisé ou la référence à Vito Corleone dans mon sermon ne vise pas à établir des liens entre Jésus et un chef de la mafia, fictif ou réel.  Oui, Jésus était entouré d’hommes et de femmes qui ont souvent tout laissé derrière pour l’appuyer et le soutenir inconditionnellement dans sa mission.  Ces personnes ne comprenaient pas toujours le grand plan de leur maître, mais ils et elles sont demeurés fidèles (sauf un) et auraient probablement tout fait pour conserver sa relation avec lui.  Cependant, Jésus ne leur a jamais fait une offre qu’on ne peut pas refuser.

Le texte de ce soir est un extrait du long discours de Jésus avant son arrestation dans l’Évangile selon Jean.  Sentant la fin approcher, il veut préparer ses disciples pour la suite des choses.  Il les invite à continuer à suivre ses commandements et à s’aimer les uns les autres comme il les aime.  Il n’y a rien de surprenant jusqu’ici vous me direz.  Cependant, Jésus continue son discours en déclarant qu’il veut modifier la nature de sa relation avec les personnes qui l’entoure.  Il désire mettre fin à leur relation maître / serviteurs.  Il ne veut plus qu’ils et elles le considèrent comme le Messie annoncé par les prophètes, le sauveur de l’humanité ou le Roi des Rois.  Il ne souhaite pas devenir un idéal auquel ils et elles comparent leurs vies.  Jésus déclare : « Je ne vous appelle plus serviteurs, parce que le serviteur ne sait pas ce que fait son maître.  Je vous appelle amis, parce que je vous ai fait connaître tout ce que j’ai appris de mon père. »  Il considère tous ses disciples, sans exception, ses amis.  Il va encore plus loin en affirmant : « Vous ne m’avez pas choisi; mais moi je vous ai choisis, je vous ai chargés d’aller, de porter du fruit et du fruit durable. »  Qu’ils ou elles soient d’accord ou non, ces anciens disciples deviennent l’égal de Jésus.  Ces hommes et ces femmes se voient confier un rôle essentiel dans la mission de créer le royaume de Dieu sur terre.  Et en retour, Jésus ne leur demande rien, même pas d’embrasser sa main ou sa bague.  

Se considérer l’ami de Jésus peut être difficile pour certains d’entre nous.  Nous pouvons nous sentir intimidés par les attentes liées à ce statut spécial.  Peut-être, nous ressentons des doutes de ne pas être assez bons ou adéquats devant la tâche qui nous est confiée.  Cependant, cette amitié inconditionnelle qui nous est offerte est une invitation à une certaine forme d’intimité.  Grâce à cette relation basée sur authenticité, nous pouvons nous ouvrir et être nous-mêmes sans masques ou faux-semblants.  Cette amitié est également une garantie d’une présence dans nos moments de réjouissance et les périodes où tout semble s’écrouler; une promesse de n’être jamais abandonné même si nous négligeons cette relation.  Cette amitié nous invite à nous aimer les uns les autres, à accueillir les autres inconditionnellement, de travailler pour le bien-être de tous et toutes et à continuer le travail de Jésus non pas obligation ou commandement, mais en raison de notre désir d’accomplir le rêve d’un être cher.  Cette amitié est un appel à agir tous les jours, peu importe que l’on soit lundi, mardi, jeudi, mercredi, vendredi, dimanche ou samedi.

Si dans le film « Le Parrain » l’amitié est quelque chose de conditionnel, Jésus offre à tous ses disciples une relation toute différente qui n’a rien de transactionnel. Il nous propose une forme d’amitié qui dépasse nos conceptions humaines reposant sur le désir de contrôler nos relations basées sur nos affinités et nos préférences.  Jésus fait les premiers pas en nous choisissant sans aucune condition.  Il désire nous aider à percevoir la présence de Dieu dans notre monde.  Il refuse d’être un maître afin de nous inclure inconditionnellement dans sa mission de transformer notre monde.  Alors, réjouissons-nous, parce qu’un ami comme lui ne court pas les rues. Avec un ami comme lui, nous n’avons rien à craindre.  Amen.

* Nathan Dumlao, unsplash.com