Sermon – Actes de Apôtres 16: 9-15 (22 mai 2022)

Actes 16: 9-15

Est-ce qu’il y a quelque chose de plus désagréable qu’un leader qui croit tout savoir ?  Que ce soit au travail, au sein d’un organisme communautaire ou dans une paroisse, il y a toujours une ou des personnes (presque toujours des hommes) qui prétendent avoir des réponses faciles pour tout.  Ils ne connaissent pas la nature du problème; ils ne parlent pas aux gens sur le terrain; ils ne prennent pas le temps d’écouter les autres, mais ils vont nous dire quoi faire.  Ils vont rédiger de longues listes de changements garantissant le succès.  Pourtant, la majorité de nos problèmes peuvent être résolus par de simples petits ajustements.  Souvent, les solutions existent déjà si nous regardons les choses d’un point de vue différent.  La plupart du temps, il faut juste aider les personnes concernées à trouver les réponses les plus pertinentes à leur contexte spécifique.  
 
Dans le texte d’aujourd’hui, nous retrouvons Paul durant son deuxième grand voyage missionnaire.  Il parcourt l’Asie Mineure pour établir de nouvelles communautés de foi.  Son itinéraire devait être programmé au quart de tour comme ce l’a été pour la visite du prince Charles cette semaine.  Mais une nuit, Paul a une vision.  Un homme de Macédoine l’implore de venir les aider.  Le jour suivant, notre ami change ses plans et s’embarque immédiatement pour la Macédoine avec ses compagnons parce qu’il est certain que Dieu les avait appelés à porter la Bonne Nouvelle aux habitants de cette contrée.  
 
Lorsque Paul arrivait dans une nouvelle ville pour y faire du travail missionnaire, il suivait toujours le même modus operandi, même si les résultats étaient rarement au rendez-vous.  Paul était fermement convaincu qu’il pouvait convaincre les Juifs de l’endroit que Jésus était le Messie.  Il allait prêcher son message dans les synagogues, mais il rencontrait beaucoup de résistance de la part des locaux.  À quelques reprises, il a même été chassé des limites de la ville à coup de pierres ou de bâtons.  Ce n’est qu’à ce moment qu’il se tournait vers son plan B.  Il prêchait la Bonne Nouvelle aux non-Juifs, avec le grand succès que nous connaissons aujourd’hui. 
 
Le texte ne mentionne pas explicitement si Paul a suivi la même recette dans la ville de Philippes.  Cependant, quelques jours après son arrivée, Paul et ses compagnons sortent de la ville pour se rendre au bord de la rivière.  En ce jour du sabbat, ils pensent trouver un lieu de prière pour les Juifs.  Arrivés à cet endroit, ils rencontrent plutôt un groupe de femmes.  Paul, incapable de passer à côté une occasion de proclamer son message, décide de faire une entorse à la tradition.  Il s’assoit avec elles et commence à leur enseigner. 
 
Parmi ce groupe, il y avait une femme de Thyatire nommée Lydie.  Le fait de connaître son nom et son lieu d’origine n’est pas banal.  Le texte spécifie également qu’elle était marchande de pourpres, une étoffe précieuse portée habituellement par la famille de l’empereur et des gens très puissants.  Sa participation à ce commerce lucratif dans une ville commerciale importante entre l’Europe et Asie, a dû rendre Lydie une personne très importante dans sa communauté. 
 
Traditionnellement, nous prenons souvent pour acquis que Paul ‘a sauvé’ Lydie en ouvrant son esprit et son cœur au Seigneur.  Cependant, nous semblons oublier qu’elle se trouvait déjà dans un endroit de prières avec ses amies.  Ces femmes devaient avoir formé une communauté de foi qui ne nécessitait pas de la présence d’hommes pour leur dire quoi faire ou mansplainer leurs croyances.   En fait, elles devaient posséder déjà tout ce dont elles avaient besoin pour vivre leur foi.  Cette rencontre fortuite avec Paul a peut-être tout simplement mis des mots sur ce qu’elles savaient déjà à l’intérieur d’elles.  Elles ont vu les choses d’un point de vue différent.  Ces femmes ont continué leur cheminement spirituel. 
 
Grâce à son leadership, Lydie a rapidement joint un grand réseau des femmes à la tête d’Églises et de communautés de foi qui soutenaient activement la mission de Paul.  Mais malheureusement, l’institutionnalisation du mouvement initié par Jésus et l’arrivée de théologiens sexistes qui ont développé de pseudo arguments divins pour reléguer toutes les femmes au second plan.  Pendant des siècles, l’Église a refusé de considérer des femmes telles que Lydie comme des personnes égales aux hommes.  Encore aujourd’hui, le travail et les ministères des femmes ne sont pas toujours reconnus à leurs pleines valeurs.  Néanmoins, plusieurs ont persévéré.  Elles ont choisi de marcher dans les traces de pionnières comme Lydie.  Elles se sont investies dans de nombreux endroits.  Malgré l’opposition et la résistance de la hiérarchie, elles ont défoncé des portes.  Elles ont défriché de nouveaux secteurs.  Elles ont refusé de jouer les seconds violons.  Ce fut difficile pour elles, mais elles ont persévéré. 
 
Aujourd’hui, en tant que disciples du Christ, notre mission n’est pas de changer le monde pour qu’il corresponde à notre image et adopte toutes nos valeurs.  Nous ne devons pas croire que nos opinions ou notre moralité est nécessairement meilleure de celles des autres.  Nous devons admettre que nous ne possédons pas toutes les réponses.  Nous sommes plutôt invités à réexaminer nos manières de faire.  Nous sommes mis au défi de parler un peu moins et d’écouter le message et les besoins des autres.  Nous sommes appelés à découvrir la présence de Dieu déjà présente dans les personnes que nous rencontrons au hasard de la route. 
 
Le passage biblique d’aujourd’hui paraît tout simple.  Il s’agit d’une autre histoire de conversion.  Paul a réussi à sauver Lydie et ses amies.  Mais ces femmes étaient déjà croyantes.  Elles formaient déjà une communauté.  Elles étaient déjà habitées par la foi.  Elles avaient juste besoin d’une chance de partager leurs talents avec le reste de l’Église.  Puissions-nous avoir la sagesse de créer des espaces et des moments où les personnes souvent exclues puissent s’épanouir et nous enseigner.  Amen.
* Kiana Bosman, unsplash.com