Sermon – Luc 21: 5-17 (13 novembre 2022)
Luc 21 : 5 – 17
Avez-vous déjà entendu parler du Great Reset, de la grande réinitialisation? En 2020, le Forum économique mondial propose de reconstruire l’économie de manière durable après la pandémie de COVID-19 avec des investissements plus orientés vers le progrès mutuel et en se concentrant davantage sur les initiatives environnementales. À première vue, cette proposition semble être pleine de bon sens. Cependant, comme vous pouvez l’imaginer, de nombreuses théories du complot ont émergé rapidement. Certains prétendent que les élites financières mondiales auraient planifié la pandémie pour créer les conditions idéales afin de restructurer les gouvernements du monde. Le principal objectif du Great Reset serait tout simplement de prendre le contrôle de la politique et de l’économique en instaurant un régime totalitaire marxiste et un nouvel ordre mondial.
Pour plusieurs d’entre nous, le texte d’aujourd’hui a autant de sens que cette théorie du complot. Le chapitre 21 de Luc appartient à une catégorie appelée « littérature apocalyptique » qui est caractérisée par des images fortes, des catastrophes massives et des tribulations pour les croyants et croyantes. Les auteurs de ces textes tentent de dépeindre un monde profondément déstabilisé, sens dessus dessous et dans lequel les normes normales de la société tiennent plus. Peut-être, ces dernières années de pandémie qui nous ont poussés aux portes de l’extrême et de l’épuisement collectif, nous permettent de saisir un peu plus l’atmosphère véhiculée dans le passage d’aujourd’hui.
À l’époque de Jésus, le Temple de Jérusalem avait retrouvé sa superbe après plusieurs décennies de rénovation. Un jour, des gens exprimaient leur admiration devant une telle œuvre architecturale. Jésus leur répond : « Les jours viendront où il ne restera pas une seule pierre posée sur une autre de ce que vous voyez là; tout sera renversé. » Sachant que l’évangile selon Luc a fort probablement été écrit après la destruction de Jérusalem par l’armée romaine, certains pourraient voir dans cette affirmation un commentaire déguisé de l’auteur. D’autres font un lien avec la mort et la résurrection de Jésus. Cependant, il continue son discours en faisant référence à de faux Messies, de guerres, de catastrophes naturelles et de persécutions religieuses. Alors, que signifient ces paroles de Jésus? Annonce-t-il la fin de notre monde tel que nous le connaissons? Sommes-nous dans cette période de déstabilisation et de tribulations? Jésus parlait-il du Great Reset?
En lisant ce passage cette semaine, je n’ai pas pu m’empêcher de penser à l’état actuel de l’Église chrétienne. Nous sommes entrés dans une phase de déclin dans le monde occidental. Nous fermons des paroisses. Nous vendons nos bâtiments. Il ne reste pas beaucoup de pierres posées sur une autre. Mais, si ce n’était que ça! Des frères et des sœurs dans le Christ s’accusent mutuellement d’avoir tort ou de ne pas être de vrais croyants. Les scandales de toutes sortes ébranlent les colonnes du temple. Les institutions ecclésiales semblent plus préoccupées par leur image que la protection des vulnérables. Les paroisses accordent plus d’efforts au maintien des traditions qu’à leur mission première de proclamer la bonne nouvelle. Pour augmenter le taux de participation et le nombre de donateurs, plusieurs embauchent des experts, des sauveurs, des Messies offrant des programmes infaillibles en 5 étapes simples garantissant une revitalisation de la communauté… qui se termine souvent en queue de poisson. Les gens deviennent de plus en plus désillusionnés, découragés, apeurés… Cette accumulation de mauvaises nouvelles nous amène à nous demander comment quelque chose de si beau et si grand est rendu au bord de gouffre. Est-ce la fin de l’Église? Est-ce la fin du monde que Jésus a annoncée?
Nous devons nous souvenir que Jésus est venu proclamer la venue d’un nouveau monde que nous nommons le Royaume de Dieu dans lequel les normes et les règles de notre monde seront complètement renversées, les premiers seront les derniers, l’ensemble de la création sera restauré. Cette proposition est tellement radicale qu’elle ne peut pas facilement s’accomplir dans le monde tel que nous le connaissons. Cette transition entre ces deux mondes représente un cheminement difficile pour plusieurs. Une restructuration de nos institutions et de nos modes de vie est nécessaire pour que ce nouveau monde émerge. Oui, ne pas savoir ce qui nous attend dans le futur est toujours épeurant. Oui, c’est toujours plus facile de céder à la panique en temps de crise que de demeurer calme. Oui, nous n’aimons pas voir disparaître des choses auxquelles nous sommes attachées émotionnellement. C’est pour ces raisons que le Christ nous a promis de demeurer présent à nos côtes durant ces moments de tempête. Il nous a promis de nous donner la force de discerner la voie que nous sommes invités à suivre. Il nous a promis de nous accorder la sagesse nécessaire pour continuer notre route.
Nous ne devons jamais confondre la fin du monde avec la fin d’un monde. Nos églises, nos temples, nos bâtiments sont des structures temporaires et vulnérables. L’Église de Dieu transcende toutes les constructions et les institutions humaines. Au-delà de nos structures, c’est le corps du Christ qui nous unit les uns aux autres. Comme la chute de Jérusalem et la destruction du Temple en l’an 70 de notre ère ont marqué la fin d’un monde pour le judaïsme et l’émergence d’un autre, cette période trouble que nous naviguons n’est qu’une phase de transition entre un monde et un autre. À quoi ressemblera l’Église du futur? Quels seront les signes qui indiqueront le moment où les choses se calmeront? Verrons-nous un jour l’aube de ce nouveau monde? Je ne le sais pas. Cependant, nous pouvons trouver du réconfort aujourd’hui dans le fait l’Église continue de grandir et évoluer dans de nouveaux lieux et parmi de nouvelles personnes. Peut-être, elle ne ressemble plus vraiment à ce que nous avons connu dans notre jeunesse, mais le même message y est toujours proclamé. Sommes-nous au milieu d’un grand reset mondial? Assistons-nous à la fin de l’Église? Devant le Temple de Jérusalem, Jésus a annoncé des périodes de perturbations profondes laissant entrevoir la venue d’un nouveau monde, du Royaume de Dieu. Alors, au lieu de céder à la peur et la panique, nous sommes invités à continuer notre chemin avec confiance et croire que Dieu demeure avec nous durant les moments de transitions difficiles. Amen.
