Le défi de l’amour

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Jean 15 : 9 – 17

Comme plusieurs le remarquèrent ce soir au cours des discussions, parler d’amour, comme chrétiens, ce n’est pas toujours simple. Chaque jour que nous nous côtoyons, chaque fois que nous ouvrons la télévision pour regarder les nouvelles, nous sommes continuellement confrontés au défi de l’amour. Aimer consiste vraiment en un « défi » de tous les jours. Et oui ! « défi » me semble être le bon terme pour parler de tout l’enjeu du commandement de Jésus. Aimer, c’est difficile ; surtout aimer jusqu’au bout comme nous le demande Jésus. S’aimer les un et les autres, mais surtout aimer nos ennemis.

Rester dans l’amour, ce n’est donc pas simple. Chacun pourrait citer nombre de cas. Un exemple parlant – pour moi – pourrait être celui des chrétiens et chrétiennes qui, à travers le monde, sont persécutés pour leur foi. Peut-être avez-vous feuilleté les journaux de cette semaine et tombé sur la nouvelle d’un  pasteur affilié à l’Église Unie de France qui a été enlevée en République Démocratique du Congo. C’est à se demander parfois combien d’entre nous souffrent en ce moment même d’un état de captivité… Une captivité qui, selon certains qui l’ont vécu, a parfois été – paradoxalement – un terrain fertile pour exercer l’amour.

Nous avons tous sûrement déjà entendu parler de ces histoires-là de résilience. Des histoires d’amour envers ses ennemis. Un amour qui va jusqu’au bout. Et, quand nous y sommes confrontés, nous ne pouvons faire autrement que de nous poser ces fameuses questions :  « Mais comment c’est possible d’aimer malgré tout ? Comment aimer ses propres bourreaux ? » Ça va contre le bon sens, c’est au-delà de nos forces, non ? Du moins, nous pouvons souvent le ressentir !

            « Voici mon commandement, nous dit Jésus : aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés. »  Aimer… aimer même ceux qui ne nous aiment pas. Déjà, si choisir la voie de l’Évangile n’est pas aussi simple que ça a l’air, aimer ses ennemis l’est probablement encore moins. Comme disciples, nous sommes appelés à faire face à toutes sortes de défis qui ont à voir avec la réception ou la non-réception de la Parole d’amour que nous voulons transmettre. Parfois, on réussit à proclamer la Parole d’amour du Seigneur. Parfois, ça ne passe pas comme nous le voudrions. Puis nous nous encourageons bien sûr quand l’amour porte fruit… mais nous désespérons parfois quand le refus se fait sentir ou – encore pire – quand la persécution frappe.

À bien y penser, c’est vrai que l’amour lui-même peut être persécuté lorsqu’il exige d’aller au-delà de nos habitudes et de mettre en lumière nos iniquités. Tous nos doubles discours, individuels ou collectifs. Avons-nous conscience, dans toute l’histoire de l’humanité, de combien de croyants sont morts à cause du défi de l’amour ? Combien de chrétiens engagés pour la paix s’opposèrent et s’opposent encore à prendre les armes, quitte à finir en prison ?

S’il y a quelqu’un qui sait dans quel pétrin peut nous mettre le défi de l’amour dans toute sa radicalité, c’est bien Jésus, n’est-ce pas ? Jésus a aimé ses disciples, Judas et Pierre inclus ; celui qui l’a vendu, celui qui l’a renié. Malgré le fait qu’il connaissait très bien les conséquences qu’il encourait, il ne les a pourtant jamais abandonnés. Jésus ne leur a jamais voué de haine ; il les a plutôt accueillies dans leur vulnérabilité, employant même le terme « d’amis » pour les désigner.

« Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés. » L’amour est un sacré défi, hein ? Bien que ce commandement de Jésus soit difficile à relever, il se pourrait que ce soit justement dans son exemple que nous puissions puiser la force nécessaire pour persévérer. Aimer malgré les trahisons. Aimer avec un cœur blessé. Aimer malgré le reniement. Aimer, même d’un amour renié. L’exemple de Jésus qui aime jusqu’au bout nous invite à accueillir l’autre dans ce qu’il est. L’accueillir avec la même miséricorde que Dieu, le même amour rempli de grâce du Créateur qui aime sa créature. Quitte à être délaissé, comme lui a été délaissé tant de fois. Quitte à souffrir tout comme souffrit Jésus.

Aimer, c’est difficile ; surtout aimer jusqu’au bout. Il n’y a malheureusement pas de recette miracle là-dedans, sinon une sorte de persévérance de croyants comme vous et moi qui prennent exemple sur le maître absolu de l’amour. Aimer, c’est tout donner… et ça fait mal. C’est vrai. Toutefois, au même moment, nous savons aussi qu’un avenir persiste au-delà des refus et des captivités. Après la pluie, le beau temps. Je sais que c’est une expression un peu bon enfant qu’on nous sert à toutes les sauces. Mais, en même temps, dans le prisme de la foi chrétienne, cette expression nous rappelle que l’amour consiste en un horizon ouvert sur autres choses que la mort.

Frères et sœurs, que cette même adhérence au Christ nous guide pour les prochains jours de tempêtes. Je nous souhaite qu’elle nous mette le sourire aux lèvres quand le beau temps reviendra finalement. Peu importe ce que pensent les gens de nous, peu importe si le défi de l’amour a l’air d’une folie aux yeux du monde, n’oublions pas que nous sommes aimés de Dieu… et que cet amour-là est un fruit de la grâce à cultiver et partager avec tous et toutes. Cultiver sans peur, sans condition. Partager le défi de l’amour… au nom de l’Amour. Amen