Avez-vous déjà dû prendre un autre chemin?
Mathieu 2 : 1-12
Souvent, nous avons l’impression de très bien connaître l’histoire de ces hommes venus d’Orient pour adorer l’Enfant Jésus en raison de nos crèches, des saynètes jouées par des enfants dans nos églises ou les nombreux films sur ce sujet. Ces trois mages venaient de Perse, d’Inde et d’Arabie. Ces savants étaient des membres d’une caste religieuse qui savaient interpréter les rêves, maîtriser les arts occultes et reconnaître les signes cosmiques. Ces étrangers ont suivi une étoile qui les a amenés à Bethléem, d’abord au palais d’un roi Hérode complètement paranoïaque et ensuite à la célèbre crèche. Ces trois rois ont rendu hommage à l’enfant recherché en lui offrant des cadeaux précieux : de l’or, de l’encens et de la myrrhe… juste avant que Joseph disparaisse de l’évangile. Coïncidence? Faites vos recherches. Plus sérieusement, la grande majorité de ces informations est issue d’une longue tradition. Le récit biblique lu aujourd’hui est très avare en détails et informations au sujet de nos mystérieux visiteurs.
J’ai donc relu attentivement notre passage tiré de l’évangile selon Matthieu et la phrase qui a retenu mon attention est le dernier verset de notre extrait. « Puis, divinement avertis en songe de ne pas retourner auprès d’Hérode, ils se retirèrent dans leur pays par un autre chemin. » Les commentaires et analyses que j’ai consultés cette semaine accordent très peu d’importance à ces mots. Je comprends que le détour des mages est justifié logiquement par la méfiance qu’ils éprouvent envers Hérode. De plus, l’histoire doit continuer d’avancer. La Sainte Famille doit fuir en Égypte pour protéger la vie de Jésus. Je comprends. Cependant, j’ai une pensée pour nos pauvres voyageurs. Ces hommes venus de loin étaient partis à l’aventure sans connaître leur destination. Mais maintenant, ils connaissent le chemin. Normalement, leur voyage de retour devrait être un peu plus facile, plus court et plus rapide. Les choses devraient être plus simples. Et non! Ces hommes doivent prendre un autre chemin. Ils doivent partir encore une fois vers l’inconnu. Ils doivent affronter de nouvelles difficultés.
Peut-être, l’objectif de ce verset apparemment anodin ne se résume pas à un simple détail sur l’itinéraire des mages. Peut-être, ces mots visent à nous rappeler que la rencontre du Christ dans nos vies mène souvent à des expériences transformatrices. Nos cheminements changent parfois radicalement après ces moments spéciaux. J’ai raconté cette histoire souvent. Lorsque j’ai ressenti mon premier appel au ministère à 17 ans, cela ne faisait vraiment pas partie de mon plan de match. Je ne pensais pas me diriger dans cette direction. Et plus de 35 ans plus tard, me voilà. Je ne dis pas que ces moments mènent toujours à des revirements spectaculaires, mais lorsque l’on y pense attentivement, nous pouvons identifier des instants où notre foi, notre spiritualité ou nos valeurs nous ont amenés à prendre un chemin qui n’était pas prévu. Nous n’avons pas choisi de suivre la voie la plus connue ou la plus facile. Pour une raison parfois difficile à expliquer, nous n’étions plus tout à fait les mêmes personnes. Nous ne voyons plus les choses de la même façon. Nous avons pris une direction différente, même si cela était inconfortable.
Je suis certain que vous me voyez venir avec mes grosses pantoufles. Durant les dernières années, nous sommes passés à travers une série d’expériences, de changements et de déstabilisations impossibles à imaginer il y a seulement 5 ans. Il y a eu la pandémie durant laquelle nous avons eu à apprendre à être l’Église de Dieu sur internet. Nous avons dû créer des modèles différents de communauté de foi. Au début, les gens ne comprenaient pas trop ce qu’était l’Église Sainte-Claire et pourquoi nous sommes demeurés en ligne après que tout le monde soit retourné dans leur bâtiment. Cependant, nous avons persévéré. Comme les mages, nous avons tenté de suivre l’étoile. Quelquefois, nous nous sommes perdus. Cependant, après 3 ans et demi, nous sommes toujours là. Nous avons atteint notre rythme de croisière. Les choses sont plus confortables. Nous connaissons le chemin. Et maintenant, il faudrait changer encore une fois la façon de fonctionner. Il faudrait encore une fois s’aventurer dans l’inconnu. Il faudrait encore une fois suivre un autre chemin.
Selon l’expression, tout ce qui n’évolue pas est condamné à mourir. Trop souvent dans nos Églises, nous sommes convaincus que nous avons atteint nos objectifs. Nous nous assoyons sur nos lauriers. Nous devenons complaisants et nous oublions ce que signifie notre appel à suivre le Christ. Nous n’avons jamais reçu la promesse d’une vie simple et facile. Notre route demeure remplie d’épreuves, de détours, de situations injustes hors de notre contrôle. Devant ce constat, nous pouvons essayer de nous camper sur nos positions; nous pouvons choisir de nous laisser mourir à petit feu ou nous pouvons trouver la foi nécessaire pour marcher sur un nouveau chemin. Nous pouvons croire que peu importe la route empruntée, le Christ demeurera toujours à nos côtés. Nous pouvons choisir de nous lancer à l’aventure, encore une fois, sans garantie de succès ou de gloire.
Parfois, nous sommes obligés de prendre un chemin différent. Les mages venus d’Orient pour adorer l’Enfant Jésus ont dû retourner chez eux par une autre route pour des raisons qui étaient hors de leur contrôle. Peu importe la voie que nous décidons d’emprunter au cours des prochains mois, nous sommes appelés à croire que notre cheminement avec le Christ va continuer d’une manière ou d’une autre. Amen.
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