L’importance des amis

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Marc 8 : 31-38

J’aurais pu facilement partir dans plusieurs directions différentes au sujet du texte de ce soir : une explication théologique, une remise en contexte sociohistorique, une description de la place de cet épisode dans le secret messianique dans l’évangile selon Marc, etc.  J’ai plutôt choisi d’explorer un terrain un peu moins fréquenté : la relation entre Pierre et Jésus. 

Les quatre évangiles nous donnent beaucoup de détails sur la vie du disciple.  Pierre était un pêcheur sur les bords du lac de Tibériade avec son frère André.  L’auteur de Marc suggère qu’il était marié et vivait avec sa belle-mère.  Un jour, Jésus débarque dans sa vie et l’invite à devenir un pêcheur d’hommes et de femmes.  D’une certaine manière, il a renié sa vie et ses proches pour suivre Jésus.  Rapidement, une relation maître – apprenti s’installe entre les deux.  Partout où le maître va, il le suit.  Dans l’évangile selon Matthieu, quand Jésus quitte la barque pour marcher sur l’eau, Pierre essaie de faire exactement la même chose.  Il y a deux semaines, nous avons lu le récit de la Transfiguration et Pierre appartenait au petit groupe restreint qui a assisté à cet événement unique.  Quelques versets avant le début du passage d’aujourd’hui, lorsque Jésus demande à ses disciples qui il est, Pierre répond : « Tu es le Christ ».

Le petit problème dans cette relation entre mentor et mentoré est que Pierre ne comprenait pas toujours le sens du message de son maître.  Le texte d’aujourd’hui débute par Jésus qui annonce à ses disciples qu’il doit souffrir, être rejeté par les autorités de leur société et mis à mort.  Nous pouvons facilement comprendre que Pierre soit perplexe à la suite de cette annonce.  À plusieurs occasions, son maître lui a demandé de ne pas parler publiquement de son identité ou de certains événements spectaculaires.  Alors, du point de vue de Pierre, pourquoi ne pas continuer dans la même veine?  Jésus n’a qu’à poursuivre sa mission sans faire de vagues ou attirer l’attention des anciens, des grands prêtres et des scribes.  Tout le monde continue à ne rien dire.  Tout le monde passe sous le radar.  Personne ne meurt inutilement.  Problème résolu!  Cependant, Jésus ne semble pas apprécier la suggestion de son disciple.  Il va jusqu’à réprimander Pierre en lui disant : « Retire-toi!  Derrière moi, Satan, car tes vues ne sont pas celles de Dieu, mais celles des hommes. »  Pauvre Pierre!  Il a dû se dire : « Branche-toi, Jésus!  On peut en parler ou ne peut pas en parler de ta mission.  Je ne comprends rien! »

Peut-être ce jour-là, Jésus a voulu simplement expliquer la réalité de son ministère à ses disciples.  Au-delà des guérisons, des multiplications des pains, des foules qui les suivent et des témoignages de quelques miraculés, se trouve une réalité plus difficile et usante à la longue.  Marcher dans les pas de Jésus entraîne nécessairement son lot de critiques, de commentaires désobligeants et d’embûches de la part de ceux et celles qui tentent de s’accrocher à leurs privilèges et au statu quo.  Comme je le répète souvent, notre foi ne nous garantit pas une existence exempte de défis et d’obstacles.  Jésus en a payé le prix ultime.  Je ne crois pas que sa mission était nécessairement de mourir sur la croix.  Cependant, en raison de son message, ses actions et le contexte de l’époque, son histoire ne pouvait pas finir autrement.  Malgré toute leur bonne volonté, Pierre et les autres disciples ne pouvaient pas changer cette réalité.  Ils devaient plutôt se préparer pour ce genre de futur lorsqu’ils seront appelés à prendre le relais de leur maître.  La vie des disciples continuera à être compliquée, imprévisible et quelques fois dangereuse.

Cependant, la bonne nouvelle pour Pierre, et pour nous tous et toutes qui tentons de marcher dans les pas de Jésus, est qu’il n’a jamais été abandonné par son maître.  Pierre a commis beaucoup d’erreurs et il va continuer en faire plusieurs plus loin dans les textes bibliques.  La plus célèbre est surement lorsqu’il a renié trois fois son maître quand il en avait peut-être le plus besoin.  Cependant, Jésus lui a pardonné comme nous le faisons souvent pour un ou une amie proche.  Dans une relation intime comme la leur, les personnes doivent être capables de tout se dire honnêtement, même si c’est désagréable à entendre.  Dans une relation intime comme la leur, les personnes ne doivent pas juger autrui à partir d’un seul événement.  Dans une relation intime comme la leur, un différend n’est pas la fin de tout.

Comme Pierre, nous ne comprenons pas toujours le plan de Dieu, les messages de la Bible ou les attentes à notre endroit en tant que disciple du Christ.  Nous nous demandons pourquoi les choses sont si difficiles.  Pourquoi ne nous limitons pas à nos petites activités dans nos églises ou nos rencontres sur internet, et laisser les autres tranquilles.  Trop souvent, nous oublions la présence dans nos vies de cet ami qui s’appelle Jésus.  Nos amis anglophones ont un cantique merveilleux qui s’appelle : What A Friend We Have in Jesus (Quel ami fidèle et tendre).  Nous sommes appelés à nous souvenir que cet ami ne nous abandonnera jamais, malgré toutes nos fautes, nos erreurs ou nos idées pas toujours brillantes.  Jésus nous a promis de demeurer avec nous, surtout lorsque la situation devient difficile.

L’apôtre Pierre partageait un lien unique avec Jésus.  Lorsque ce dernier annonce qu’il doit souffrir, être rejeté par les autorités et mis à mort, le disciple a exprimé son désaccord au grand déplaisir de son maître.  Cependant, cet épisode n’a pas mis fin à leur relation tout comme toutes nos erreurs et nos égarements ne peuvent pas nous séparer de l’amour du Christ.  Même dans les moments difficiles, nous pouvons compter sur notre ami Jésus.  Amen.