Pierre dans tous ses états!

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Jean 21 : 4 – 7

Pierre, Pierre, Pierre ! Quel sujet, quelle boîte de Pandore nous venons d’ouvrir, n’est-ce pas ? On aurait tellement long à dire sur notre Simon-Pierre qu’on pourrait passer la soirée à en discuter sans jamais s’arrêter.

Sacré Pierre, oui… Si on me demandait ce que je pense de sa personnalité ou de son rôle dans les textes bibliques, je vous avouerais que ma première réaction serait de vous dire : « Attendez que je m’éponge un brin… Pierre, c’est compliqué… »

Dans un sens, ça explique peut-être pourquoi il fascine autant, notre beau Pierre. A moins d’un champ d’intérêt spécifique en exégèse, je ne perçois pas le même intérêt envers Matthias, Jacques, Jean et… même Judas dans une certaine mesure. Pierre, c’est à un autre niveau ! Si tu veux faire lever la pâte à un Bible Party, commence par le sujet de Pierre. C’est un succès quasiment garanti pour passer du bon temps… ou avoir des ennuis. Personne ne reste indifférent vis-à-vis de lui. Ni les disciples, ni Paul… et encore moins Jésus.

À vrai dire, cet intérêt-là pour Pierre n’est pas tout à fait étonnant. Non seulement Pierre est un personnage central dans les Évangiles, les Actes des apôtres et toute la littérature épistolaire, mais il est aussi un incontournable quand on veut comprendre le ministère de Jésus et le développement de l’Église. On peut dire, sans jeu de mots, que Pierre est une véritable clef d’interprétation.

Toute cette importance de Pierre, des conflits et des discussions qu’il généra, les allers-retours et les dramas qui gravitaient autour de sa personne démontrent en fait à quel genre de personne on a affaire.  Parfois hypocrite selon Paul, inconstant selon les évangélistes. Par contre, nous devons avouer qu’il s’avère extraordinairement audacieux à ses heures. Avec Pierre, l’Église s’engage souvent dans des tournants inattendus. Rien de moins fascinant pour un féru de littérature comme moi que de voir tout le parcours de ce personnage-là ainsi que ce qu’il a amené dans l’histoire de l’Église.

Son évolution narrative, sa maturation de foi, sa transition du point A au point B se produit par une série de remises en question, de paroles audacieuses, mais aussi de coups de gueule monumental. C’est d’ailleurs le personnage, avec Paul, qui évolue le plus au cours de la narration des récits du Second testament.

Inconstant dans son accueil et sa reconnaissance des non-juifs dans la communauté chrétienne… Tiraillé entre les vieilles outres et les nouvelles, Pierre a pourtant été le premier disciple à identifier Jésus comme Christ. C’est à lui que Dieu envoya un songe pour annoncer le baptême des non-juifs. En accumulant ainsi les paroles audacieuses et les coups d’éclat, Pierre était en quelque sorte un réformateur malgré lui. Sous l’impulsion de l’Esprit qui fait toutes choses nouvelles, son parcours de foi à profondément changé le visage de la communauté chrétienne.

Coups de gueule, remises en question, face palm et réformes… Fort intéressant dans ce cas que notre Jésus qui lui dit un jour : « Tu es Pierre et sur cette Pierre je fonderai mon Église. » Si cette parole-là a été interprétée à toutes les sauces, rares sont ceux et celles qui reconnurent ici l’absolue audace de Jésus qui s’appuie, en fait, sur une pierre plutôt branlante. Une pierre inconstance qui a ses hauts et ses bas… mais une pierre, aussi, qui roule un méchant temps. Une pierre qui, poussée par l’Esprit, se réforme continuellement.

À la lumière des textes, Pierre ne laisse décidément pas le jour de demain être le même que les précédents. «  Tu es Pierre et sur cette Pierre je fonderai mon Église.  » En accordant ainsi de l’importance à Pierre, Jésus n’a clairement pas choisi le statu quo. Il n’a pas choisi la sécurité, mais le risque. Le risque d’une Église qui change et avance dans les pas de l’Esprit.

Dans ses fêlures, ses doutes et ses audaces, on ne peut pas faire autrement que de reconnaître en Pierre notre communauté… et notre propre comportement à certains égards. Notre histoire personnelle en témoigne, nos discussions aussi. Qui n’a jamais joué la « sainte nitouche » en ne voulant pas traîner avec certaines personnes ou en s’évertuant à suivre des codes religieux délimitant le « pur » de « l’impur » ? Que faisons-nous chaque dimanche si ce n’est pas discuter des apprentissages que le Seigneur fit monter en nous au cours de notre vie ? Comme dans le cas de Pierre qui s’écrie que Jésus est le Christ… combien de fois avons-nous quitté Zoom en nous disant : « Et bien… je n’avais pas pensé à ça de même ! »

Nous aussi, on est des pierres qui roulent et sur lesquelles repose une grande responsabilité. C’est à nous que Jésus demanda de prendre soin de ses brebis, de réformer continuellement sa communauté afin de mener à bien la mission qui nous a été donnée. Par le témoignage de Pierre, l’Esprit nous invite à nous reconnaître avec humilité comme des personnes qui se laissent modeler par l’Esprit et qui, grâce à celui-ci, prennent de la maturité.

Pierre, quelque part, c’est monsieur et madame tout-le-monde. C’est nous autres. Et vaut mieux être Pierres qui roulent que statues de sel qui restent tournées vers les choses passées. Dans ce cas, on peut rendre grâce à Dieu pour toutes les Pierres de l’Église ! J’ose croire que chacune d’entre elles s’avère nécessaire pour la construction du royaume. Des pierres, uniques, désirées… pleines de vie, s’en allant à gauche pis à droite… mais prêtes à rouler là où la Parole nous dicte de nous rendre.

Que l’Esprit continue à nous réformer chaque jour, que la paix du Seigneur soit avec nous tous. Maintenant et toujours.

Amen