Sermon – Esther 7: 1-10; 9: 20-22 (26 septembre 2021)

Esther 7: 1-10; 9: 20-22

J’adore le livre d’Esther situé dans le Premier Testament.  Malheureusement, le lectionnaire propose qu’un seul court passage tous les 3 ans.  Ne vous sentez pas mal si vous ne connaissez pas bien cette histoire qui se lit comme un roman.  Le récit est centré autour d’une jeune orpheline juive nommée Esther qui habite en Perse.  À la suite d’un concours de circonstances, elle participe à une version antique de The Bachelor.  Elle remporte la compétition et devient l’épouse du puissant roi Xerxès.  Le seul petit problème est qu’Esther doit cacher sa vraie identité parce que son peuple est considéré comme des sujets suspects et déloyaux.  Ils sont des étrangers qui refusent de s’assimiler et suivre les lois de la majorité.

Tout va relativement bien pour la nouvelle reine jusqu’au moment où Haman, un haut fonctionnaire de la cour, décide d’exterminer tous les Juifs du royaume.  Il approche le roi et le convainc de signer un décret en ce sens.  Une date est fixée pour ce génocide.  Rien ne semble pouvoir arrêter ce bain de sang.  Lorsque Mardochée prend connaissance de funeste plan, il contacte sa nièce, Esther, et lui fait savoir que le temps de demeurer silencieuse est maintenant révolu.  Malgré son rang social, elle est en danger comme le reste de son peuple.  Et qui sait?, ajoute Mardochée.  Peut-être est-ce pour faire face à une telle situation qu’elle est devenue reine.  Peut-être qu’elle est l’héroïne qui réussira à sauver les Juifs.  Peut-être qu’elle a un rôle important à jouer dans l’histoire du peuple de Dieu.

Malheureusement, Esther n’a pas beaucoup de temps devant elle.  Elle ne peut pas créer un petit comité pour étudier la situation pendant des mois afin d’établir un plan d’intervention avec les forces vives du milieu.  Elle doit choisir rapidement si elle demeure silencieuse afin de tenter de sauver ses fesses ou si elle ose plaider la cause de son peuple devant le roi, sans aucune garantie de succès ou même de demeurer en vie. 

J’aimerais tenir pour acquis qu’aucun ou aucune d’entre nous n’a eu à affronter une situation semblable, à prévenir un génocide.  Cependant, nous sommes toutes et tous confrontés à des dilemmes difficiles à un moment ou un autre au cours de nos vies.  Combien de fois un proche a exprimé des propos discutables et nous avons hésité entre intervenir ou nous taire?  Combien de fois avons-nous reçu une offre payante qui ne correspondait pas vraiment avec nos valeurs?  Combien de fois avons-nous été réticents à nous engager socialement parce que cela entrait des conflits dans nos horaires ou modifiait nos habitudes?  Durant ces moments, nous nous demandons souvent si l’effort vaut la peine, si nous y gagnerons quelque chose, si nous pouvons vraiment faire une différence, si nous mettons en jeu nos liens avec les autres. 

Parfois nous agissons.  Nous joignons des comités ou des groupes d’actions.  Nous écrivons des lettres à nos élus.  Nous manifestons dans la rue.  D’autres fois, nous préférons notre confort.  Nous affirmons qu’il y a toujours deux côtés à la médaille.  Nous ne voulons pas prendre une position qui pourrait se retourner contre nous dans le futur.  Nous ne voulons pas être identifiés comme un activiste, une radicale ou des fauteurs de troubles.  Nous demeurons dans notre coin et nous regardons passer la parade silencieusement. 

Esther aurait pu décider de suivre la route la plus facile.  Elle pouvait demeurer dans son palais et se convaincre que cette crise ne la concernait pas.  Elle en avait assez de s’occuper de son propre cas.  Cependant, elle a plutôt choisi d’agir.  Malgré le danger, Esther s’est présentée devant le puissant roi de Perse qui devait l’apprécier davantage pour sa beauté que son cerveau.  Elle a déclaré qu’elle appartenait à un peuple condamné à mort.  Dans un acte de courage extraordinaire, Esther a dévoilé son identité.  Elle a accepté d’être complètement vulnérable afin d’assurer le bien-être du peuple de Dieu.

Nous sommes tous et toutes invités à prendre des risques dans nos vies, à oser suivre un chemin un peu plus compliqué.  Parfois, Dieu a besoin de nous pour dénoncer et s’opposer à l’exploitation de nos frères et de nos sœurs.  Nous sommes appelés à rechercher la justice et résister au mal.  Nous sommes appelés à croire tous ceux et celles qui ont été abusés.  Nous sommes appelés à avoir le courage de nos convictions et de nos valeurs.  Même dans des moments difficiles, nous pouvons toujours choisir de parler publiquement pour les sans-voix de notre monde.  Nous pouvons toujours choisir de nous ranger du côté des opprimés.  Nous pouvons toujours choisir d’écouter l’appel de Dieu et faire le bon geste, pour les bonnes raisons, même si cela est impopulaire.

 Dans le fond, le récit du livre d’Esther nous rappelle comment il est facile de détourner le regard lors de situations difficiles, de suivre simplement les directives de nos supérieurs sans se poser de questions ou ne pas sourciller quand un gouvernement bafoue ses propres lois lorsque nous ne sommes pas affectés personnellement.  Néanmoins, Dieu nous appelle à être courageux et audacieux, à dénoncer les injustices, et à aller dans des endroits inconfortable ou même dangereux.  Nous sommes toutes et tous invités à utiliser nos dons, nos talents et nos ressources pour rejeter toutes formes d’abus.  Comme Esther, nous sommes appelés à ne pas demeurer silencieux.  Amen.

*Rochelle Brown, unsplash.com