Sermon – Matthieu 1: 18 – 25 (18 décembre 2022)

Matthieu 1 : 18-25

Il y a 12 ans, j’ai reçu un téléphone de Read Sherman, l’actuel pasteur de Trinity United de Montréal qui était à l’époque, comme moi, en paroisse dans la région d’Ottawa.  Nous étions à quelques jours d’une rencontre régionale et il recherchait quelqu’un pour offrir une réflexion sur le texte d’aujourd’hui, tiré de l’évangile de Matthieu.  À ce moment, nous étions en fin de notre processus d’adoption.  Un match avait été fait.  Nous avons reçu une photo et les documents médicaux de l’enfant, mais en raison de toutes sortes de complications administratives, nous ne pouvions pas aller le chercher.  À la rencontre régionale, j’ai offert une réflexion sur mon fils qui n’était pas de ma chair, de mon sang ou de mon ADN.  Il n’était pas un deuxième choix, un fils de remplacement ou même un fils adoptif.  J’étais devenu un père qui attendait que son fils arrive finalement à la maison.

Les sept versets de notre extrait d’aujourd’hui est le grand moment de Joseph dans le Nouveau Testament.  Bien sûr, il est mentionné ou même présent dans les autres évangiles.  Dans Luc par exemple, il amène sa fiancée enceinte à Bethléem avant que Jésus y naisse.  Plus tard, il oublie son fils au temple de Jérusalem pendant plusieurs jours.  Cependant, il disparaît assez rapidement des récits sans aucune explication.  Est-il mort?  Les évangélistes voulaient-ils éviter une confusion entre lui et celui que Jésus appelait son Père, Dieu?  Nous ne le serons jamais.

Pourtant, malgré l’absence d’apport au bagage génétique de Jésus, Joseph demeure un personnage essentiel dans l’histoire du Christ.  Ce charpentier était fiancé à une jeune femme nommée Marie.  Ce mariage était fort probablement une alliance entre deux familles comme cela se produisait beaucoup à cette époque.  La vie de Joseph était sans histoire… jusqu’au jour où il reçoit une nouvelle qui chamboule complètement son existence.  Marie est enceinte.  N’ayant jamais connu sa promise (je crois que l’on comprend tous et toutes cette formulation biblique), il en arrive à la seule conclusion logique : un autre homme est le géniteur de cet enfant.

Profondément blessé, humilié ou frustré par cette situation inconfortable, Joseph doit prendre une décision difficile très rapidement.  La première option est de rompre son engagement avec la famille Marie.  Selon la loi de Moïse, il est totalement dans son droit.  Personne ne le blâmera cette décision.  Il peut le faire discrètement pour éviter l’humiliation publique et vivre cette épreuve en privé, comme un vrai homme.  Bien sûr, la vie de Marie sera difficile après ce rejet, mais après tout, c’est à l’autre homme de ramasser les pots cassés.

L’autre option est d’accepter Marie et son enfant à naître.  Il peut choisir de sauver les apparences et maintenir les bonnes relations entre les deux familles.  Il peut renoncer à ses rêves à fonder une famille comme tout le monde dans sa société.  Il peut accepter d’être la risée des gens de son village parce que tout le monde sait compter jusqu’à neuf et vont s’apercevoir qu’il manque des mois.  Il peut croire à l’histoire abracadabrante de Marie et espérer qu’elle lui demeure fidèle dans le futur. 

Probablement très peu d’entre nous ont connu ce genre de dilemme.  Cependant, je crois que nous avons tous et toutes eu à affronter ce genre de choix difficiles à un moment ou l’autre de nos vies où deux ou trois options se présentaient devant nous sans qu’aucune semblait bonne.  Que faire lorsqu’une situation non prévue s’invite dans nos vies?  Choisir de suivre les règles au pied de la lettre peu importe les répercussions et les développements pour les autres?  Aller contre nos valeurs profondes?  Ne rien faire et nier le problème?  Même l’absence d’action est un choix qui entraîne des conséquences.

Selon l’expression, la nuit porte conseil.  Un ange du Seigneur apparaît à Joseph durant un rêve et l’invite à suivre le chemin le plus difficile.  Il décide d’accepter l’appel de Dieu et prend sa place dans la grande histoire du peuple de Dieu.  Peu importe les ragots à son sujet, peu importe l’absence de lien biologique avec l’enfant, peu importe ses aspirations pour le futur, Joseph dit oui.  Il prend Marie dans sa maison.  Il accueille cet enfant comme son fils bien aimé.  Sans savoir comment toute cette histoire va se terminer, il choisit de croire que sa situation est l’accomplissement d’une ancienne promesse.  Cet enfant est l’Emmanuel, Dieu avec nous, qui sauvera son peuple de ses péchés.

Nous entendons souvent que l’avent est un temps de préparation à Noël même si nous connaissons parfaitement le dénouement de cette histoire.  Mais si l’avent était un temps pour se préparer à l’imprévu, les complications ou l’absence de contrôle sur nos vies.  Si l’avent était un temps pour se préparer à la présence dans nos vies d’un Christ d’une manière qui ne correspond pas à celle imaginée.  Souvent, nous sommes invités par Dieu de suivre un chemin moins fréquenté, d’explorer des terrains inconnus ou de prendre des directions insoupçonnées.  Parfois, nous sommes appelés à défier des conventions sociales et aller à l’encontre de nos espoirs légitimes.  Certains jours, Dieu nous montre une autre voie et a besoin de nous pour accomplir son plan.  Dieu a besoin de notre courage, de notre sang froid, de notre foi.  Dieu a besoin que nous osions dire oui. 

Le récit de la naissance de Jésus n’est pas comme un film à l’eau de rose.   Il s’amorce avec une nouvelle perturbante qui défi les normes et les conventions de cette époque.  Cette histoire, loin d’être parfaite, connaît un dénouement heureux parce qu’un seul homme a dit oui à sa fiancée, à son enfant à naître et à la promesse de Dieu.  Ce simple mot de trois lettres a changé le cours de l’humanité.  Ce mot, nous pouvons le répéter tous les jours, surtout lorsque nous ne sommes pas prêts à affronter pour les défis devant nous.  Peu importe les situations, nous pouvons toujours dire oui à Dieu.  Amen. 

* jochen van wylick, unsplash.com