Sermon – Matthieu 6: 25-34 (10 octobre 2021)
Matthieu 6 : 25-33
Même si vous n’êtes pas de grands amateurs de hockey, vous avez surement entendu parler de LA nouvelle de cette semaine. Carey Price, le gardien de but vedette du Canadien de Montréal, va rater le début de la saison parce qu’il a intégré le programme d’aide de la Ligue nationale de hockey pour s’occuper de sa santé mentale. Cette annonce a été faite 5 mois après qu’un autre joueur du Canadien, Jonathan Drouin, ait quitté le club juste avant les séries éliminatoires pour soigner des problèmes chroniques d’anxiété et d’insomnie. Plusieurs affirment que le geste de ces deux hommes est très courageux parce qu’ils évoluent dans un contexte de masculinité toxique. Dans ce milieu, un homme se doit d’être dur avec soi-même. Les problèmes mentaux sont des signes de faiblesse. Le mental toughness, la dureté du mental, permet de surmonter toutes les épreuves.
En cette journée mondiale de la santé mentale, nous pouvons nous demander si l’anxiété est le mal de notre siècle. Pourquoi les maladies mentales sont-elles encore taboues? D’où vient cette gêne qui nous empêche d’en parler publiquement? Je souffre d’anxiété généralisée et d’insomnie chronique depuis très longtemps. D’ailleurs, je n’ai pas eu une bonne journée aujourd’hui. La raison n’est pas que je suis trop stressé dans la vie, que je bois trop de café ou que j’ai des problèmes d’enfance irrésolus. Je suis simplement atteint d’une maladie pour laquelle je suis médicamenté depuis plus de 20 ans… et je suis loin d’être le seul. Environ 10% des adultes sont touchés d’une manière ou d’une autre par l’anxiété. L’an dernier, pendant la pandémie, il est estimé qu’un milliard de comprimés ont été prescrits… pour le Québec seulement. Cette maladie est largement rependue, mais dans le discours populaire on entend toujours que c’est quelque chose qui se résonne et se guéri facilement. Et encore une fois, n’allez pas croire que les milieux d’Église sont nécessairement meilleurs que les autres. Selon mon expérience, on peut se faire dire que nous sommes trop fragiles émotionnellement, que nos pratiques spirituelles sont inadéquates ou que nous manquons de confiance en Dieu.
Le texte de ce soir est un classique pour célébrer le dimanche de l’Action de grâce. Cet enseignement de Jésus se trouve à l’intérieur de son grand discours sur la montagne durant lequel il présente les bases d’une société renouvelée selon les grands principes de Dieu. Essentiellement, il invite ses disciples à ne pas s’en faire avec les problèmes de notre monde. La nourriture et les vêtements sont des considérations triviales dans le grand ordre des choses. Regardez les oiseaux qui survivent sans semer, moissonner ou remplir des greniers de récoltes. Regardez les fleurs qui sont magnifiques sans avoir à travailler, tisser des vêtements ou suivre la mode. Dieu, qui sait ce que nous avons de besoin. Dieu prendra soin de vous.
À plusieurs reprises, nous nous sommes fait dire qu’en mettant le royaume au centre de notre vie, Dieu allait finir par combler nos vrais désirs; nous donner ce nous avons réellement besoin. Nous avons été invités à croire que Dieu peut régler ces menus détails, parce que sinon comment pourrions-nous avoir confiance lorsque nous faisons face à de grands défis. Nous avons entendu que notre incapacité à percevoir la présence protectrice de Dieu est due principalement à nos inquiétudes. Nos peurs nous empêchent de pleinement profiter du monde que Dieu a créé. Notre anxiété n’est rien de moins qu’un manque de foi en un Dieu tout-puissant.
Ces mots qui semblent sortir de la bouche d’un vieux hippie fumant du pot dans son trailer au fond d’un champ, nous les avons entendus probablement mille et une fois. Ils sont devenus des clichés que nous ne remettons plus en question. Mais qu’en est-il de ceux et celles qui vivent dans la pauvreté, l’isolement et la misère quotidienne ? Qu’en est-il des victimes des famines, des génocides ou des changements climatiques ? Leurs problèmes et leurs inquiétudes vont-ils disparaître magiquement s’ils et elles s’abandonnent à Dieu? Encore une fois, est-ce que Dieu est une machine distributrice qui récompense ceux et celles qui croient adéquatement? Est-ce que Dieu nous aime vraiment tous et toutes? Est-ce que nos actes manqués, nos mauvaises pensées, nos humeurs débalancées nous coupent de l’abondance promise par Jésus?
Peut-être parce que la vie dans notre bas monde est difficile, nous nous sommes créé un vison d’un Dieu omnipuissant qui veille sur notre bien-être. Peut-être voulons-nous croire que nous possédons un savoir différent et supérieur du reste du monde. Peut-être que le message est beaucoup plus simple en fait. L’oiseau ne se demande pas comment il va payer son hypothèque le mois prochain; il cherche simplement quelque chose à manger. Les fleurs ne pensent pas aux commentaires des autres fleurs sur Facebook; elles cherchent seulement un peu de soleil et de pluie pour grandir. Nous pouvons tous et toutes nous faire des cheveux blancs ou même les perdre, mais cela n’ajoute pas une seule journée à notre vie. Nous ne pouvons pas changer le passé. Nous ne pouvons pas contrôler le futur. Nous avons seulement un peu de pouvoir sur le présent. C’est le seul moment où nous pouvons agir. Nous sommes invités à nous concentrer sur les tâches juste devant nous. Nous sommes appelés vivre aujourd’hui et laisser le lendemain se soucier de lui-même. La peine qui se présente chaque jour suffit pour la journée.
La fête de l’Action de grâce est considérée comme le moment privilégié pour remercier Dieu pour toute l’abondance que nous avons reçu. Mais pour ceux et celles qui vivent dans la peur, l’inquiétude et l’anxiété, ce moment est plus difficile. Nous sommes invités à nous rappeler que leur condition n’est pas une faiblesse ou un manque de foi. Ces personnes sont souvent à la recherche d’une abondance de compassion dans leur vie. Ces personnes recherchent souvent une personne pour les accomplir les tâches quotidiennes tout simplement. Amen.